Précarité, bourses, APL : cinq minutes pour comprendre la crise dans les universités

Des étudiants se mobilisent contre la précarité à l’appel de plusieurs syndicats. On fait le point.

Des étudiants manifestent près du Crous à Lyon le 12 novembre 2019. AFP/PHILIPPE DESMAZES
Des étudiants manifestent près du Crous à Lyon le 12 novembre 2019. AFP/PHILIPPE DESMAZES

    Mardi, des centaines d’étudiants se sont réunis devant les Crous d’une quarantaine de villes françaises. Ils réclament davantage de mesures contre la précarité des étudiants.

    A l'origine de cette grogne, le geste désespéré d'un jeune homme de 22 ans, vendredi 8 octobre, qui a tenté de s'immoler par le feu devant le Crous de Lyon, pour alerter sur cette précarité, aux facteurs multiples.

    Une précarité qui touche un étudiant sur cinq

    Selon une enquête de l'Insee, 20% des étudiants vivaient sous le seuil de pauvreté en 2016. Parmi ceux-là, on trouve des étudiants boursiers mais pas seulement. Certains ne sont pas éligibles aux bourses, mais ne peuvent pas non plus compter intégralement sur l'aide de leurs parents.

    Selon l'Observatoire national de la vie étudiante, près d'un étudiant sur deux travaille pour financer ses études. Une très large majorité (88%) affirme que cet emploi leur est indispensable pour vivre.

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    Pour Etienne, étudiant en master de mathématiques et membre du syndicat Solidaires étudiant.e.s, cet emploi est aussi un important facteur d'échec. «Beaucoup d'étudiants abandonnent parce qu'ils n'arrivent pas à gérer leur job et leurs études, explique-t-il au Parisien. Les congés de révisions ne sont pas facile à obtenir et avec l'augmentation du contrôle continu, cumuler les deux est encore plus compliqué ».

    Pour les étudiants boursiers qui travaillent en plus de leurs études, le risque est grand : leur bourse peut leur être retirée s'ils ne sont pas assez assidus en TD, ou s'ils ne valident pas suffisamment de crédits. Un étudiant en licence peut utiliser cinq droits à la bourse : les deux premiers ne sont pas conditionnés à leur réussite, mais ils ne peuvent obtenir un quatrième ou un cinquième droit qu'à condition d'avoir validé au moins deux 120 crédits, soit deux années d'études. Le jeune Anas, qui a tenté de s'immoler par le feu, avait perdu ses droits parce qu'il triplait sa deuxième année de licence.

    Malgré les bourses et les petits boulots, un étudiant sur deux dit avoir dû se restreindre au moins une fois depuis le début de l'année en raison de difficultés financières, selon le même organisme. Ces privations peuvent concerner les repas, mais aussi les soins de santé et les produits d'hygiène.

    Une hausse du coût de la vie

    Selon les syndicats étudiants, la principale raison de cette augmentation de la précarité est la hausse du coût de la vie. Chaque année, l'Unef publie une enquête sur l'évolution du coût de la vie pour les étudiants.

    En 2019, le syndicat estime que ce coût a augmenté de 2,83%, soit deux fois plus que l'inflation (à 1,2% en juin 2019), notamment en raison de la hausse des loyers et l'augmentation des prix des transports. Certaines villes cumulent ces deux facteurs, comme Bordeaux, Rennes, Lille ou encore Lyon.

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    Des aides au logement en baisse

    La mesure avait fait grand bruit, dès le début du quinquennat d'Emmanuel Macron. En octobre 2017, le gouvernement a annoncé une baisse de 5 euros par mois des APL (Aides personnalisées au logement), une mesure très impopulaire, qui a touché directement les étudiants : beaucoup d'entre eux comptent sur cette aide pour payer leur loyer. En 2017, 800 000 étudiants touchaient des APL.

    A cette mesure s'est ajoutée, un an plus tard, la décision de désindexer les APL de l'indice de révision des loyers. En clair, le montant des aides au logement n'a pas suivi l'inflation. La Fondation Abbé Pierre a évalué le manque à gagner à 4,20 euros par mois par allocataire.

    Un manque de logements étudiants

    Cette diminution des aides au logement serait moins problématique si par ailleurs tous les étudiants en difficulté pouvaient bénéficier d'une chambre étudiante dans un Crous, où les prix sont peu élevés. Aujourd'hui, ce n'est pas le cas : selon l'Observatoire de la vie étudiante, seulement 12% des étudiants logent dans une résidence universitaire.

    Selon Mélanie Luce, présidente de l'Unef, «dans une ville comme Paris, pour un étudiant en dessous du 4e échelon de bourse, il est quasi inespéré de trouver un logement en Crous».

    Quelles solutions ?

    Dans les revendications des manifestations de mardi, on retrouvait notamment l'hypothèse d'un salaire étudiant universel. L'Unef réclame ainsi, à long terme, « une allocution d'autonomie ».

    Pour Mélanie Luce, celle-ci devrait être calculée en fonction de la situation des étudiants, non plus en fonction de celle de leurs parents, comme c'est le cas aujourd'hui pour les bourses. « Le revenu des parents n'est pas celui des étudiants. Chaque situation familiale est différente, il faut que les aides le prennent en compte », explique-t-elle.

    Dans les mesures plus immédiates, Mélanie Luce estime qu'il faudrait allouer des bourses à davantage d'étudiants, et augmenter leur montant. Aujourd'hui, l'échelon de bourse le plus élevé correspond à 550 euros par mois, pendant 10 mois de l'année.

    Les syndicats étudiants prévoient de participer à la journée de mobilisation du 5 décembre pour faire valoir ces revendications.

    Par Adélaïde Tenaglia

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